« J’aime pas les
champignons ! ».
Que cette phrase soit prononcée sur
un ton de victoire et de fierté (genre « Tu ne le sais pas encore mais
écoute bien ça, ça va révolutionner ta vie ») ou hurlée dans un élan de
contestation devant une assieste pleine (comme pour dire « Il n’y a pas
moyen que ces trucs franchissent le pas de ma bouche »), mes parents ont
du l’entendre fréquemment quand j’étais petite fille. Elle allait de pair avec celles
clamant la même règle pour les carottes cuites, le choux et les petits pois.
La différence avec les
champignons est que maintenant j’adore ça ! J’en ferai des folies, ne peux
pas imaginer ma vie sans, ne peux pas concevoir comment d’autres n’aiment pas
ça et encore moins comment j’ai pu faire partie de cette catégorie-là un jour.
C’est bizarre comme nos goûts
changent… Et c’est étrange comme cette
règle ne s’applique bien sûr pas qu’aux légumes.
Car on a bien sûr tous
expérimenté ça en amour aussi.
Telle personne qui nous semblait
trop belle pour être vraie un jour, n’accroche même plus notre regard quelques
mois après.
Et qui n’a jamais entendu
d’histoire de rencontre dans laquelle au moins un des deux protagoniste clame
fièrement « Je l’ai detesté longtemps avant de l’aimer ! ».
Et qu’on ne me sorte pas un beau
laïus sur la fine frontière qui existe entre haine et amour. A mon avis, dans
la vie, on récolte ce que l’on sème, tout simplement. Et si cela vaut pour le
basilic qui pousse sur le bord de nos fenêtres d’appartements en ville (et qui
grandit donc avec tous les bienfaits des pots d’échappements), il en va de même
pour les rencontres.
En fonction de notre état, on « voit » et on
rencontre certaines personnes et pas d’autres. On passe clairement à côté
d’hommes ou de femmes (dans la rue, en soirée, …) qui seraient pourtant bien
meilleures pour notre santé que celles qu’on décide d’aborder. On fait
l’impasse sur la viande alors qu’on a besoin de fer. On se gave de hamburger
alors que notre corps a besoin de fibres.
Quand on est mal dans notre peau, un peu perdu et pas sûr
de ce qu’on souhaite pour nous et pour notre vie (autrement dit en carence), on
rencontre souvent des personnes qui renvoient ce même mal-être.
Le problème est que, sur le coup, on ne s’en rend en
général pas compte mais qu’on est par contre expert pour partir dans la
mauvaise direction.
Les êtres en question ont beau être gentilles,
intelligentes, mignonnes, sensibles, ouvertes et intéressantes, il n’en reste
pas moins qu’elles sont souvent le pire choix qu’on puisse faire pour soi-même.
Un peu comme trop de sucre pour un diabétique.
Et ça c’est quand elles sont gentilles, intelligentes,
mignones, etc… parce que certaines fois elles sont juste bêtes, méchantes,
vulgaires et aussi laides de l’intérieur que de l’extérieur. Mais la brillance
de l’emballage nous fait passer à côté du fait que le produit est bouré
d’additifs et qu’il n’a rien de naturel.
A d’autres occasions, on a beau rencontrer des personnes
gentilles, intelligentes, mignonnes, etc… on est incapable d’y voir d’1) une
opportunité et et de 2) tout le bien que cela pourrait nous faire (les légumes
c’est pas bon, hein ?) et on passe donc allégrement à côté d’un bonheur
simple pour se compliquer la vie avec des histoires alambiquées et sans avenir.
A certains moments, on passe même proche de l’overdose. On
sait que notre foie ne supporte pas les excès d’alcool, de chocolat et de mecs
en bois, mais on continue quand même, poussé par une force irrépressible venant
de nul part et complétement incapable de se retenir.
En fait, c’est comme si on naviguait dans un petit marché
de producteurs tout mignon (le marché, pas le producteur) et que d’un jour à l’autre,
on ne voyait pas les mêmes produits. Un jour c’est saucisson, fromage et miel,
et l’autre courgettes, citrouille et fraises. On a en fait jamais, ou très
rarement, accès à l’ensemble de la gamme et bien souvent, on a même pas envie
d’acheter car on arrive à se persuader qu’on a pas faim (petit clin d’œil aux
célibataires éternelles qui se font croire à elles-mêmes qu’elles sont mieux
toutes seules).
Au fil des années, des rencontres et des essais de
nouvelles variétés, nos goûts changent. On
laisse de côté les bad boys, les salsifis et la crème épaisse pour tout
capitaliser sur les aubergines, l’huile d’olive et les hommes à l’écoute
attentive. On change et ce changement en appelle d’autres autour de nous…
Cela dit, personnellement je n’aime
toujours pas ni les petits pois ni les mecs en bois.